“Conner Rousseau jouera un rôle important à l’issue des élections de 2024”

L’arrivée en 2019 de Conner Rousseau, à l’âge de 27 ans, à la tête du sp.a avait été accueillie avec un certain scepticisme par les observateurs. Ils ont eu tort. Aujourd’hui, quatre ans plus tard, le parti a doublé son score dans les sondages. Avec 16 à 17% des intentions de vote, Vooruit occupe une solide troisième place dans le paysage politique du nord du pays, derrière le Vlaams Belang et la N-VA, mais loin devant le CD&V et l’Open Vld. Son président est le deuxième politique le plus populaire en Flandre derrière Bart De Wever. C’est donc très logiquement qu’il devrait être plébiscité ce week-end par les cadres et les militants pour un second mandat à la tête du parti.

Quelle est la clé de cette réussite peu commune en politique belge? Carl Devos, politologue à l’université de Gand (UGent), épingle le contexte politique. “Après les nombreux déboires traversés depuis la période faste de Steve Stevaert au début des années 2000, le parti était prêt pour le changement.”

Rousseau s’est attelé à réorganiser le parti dont le siège a quitté la place du Marché aux Herbes à Bruxelles pour rejoindre le bâtiment du Boulevard de l’Empereur, sous le même toit que le PS. Il a changé le nom du parti en Vooruit et réformé le service d’études. “Le parti lui a fait confiance. Une partie du mérite revient à l’ancien président John Crombez, qui a confié les clés de la maison à Rousseau et l’a mis sur orbite”, rappelle Carl Devos.

Mais ce sont surtout les qualités personnelles de Conner Rousseau qui ont fait le reste. “C’est un communicateur hors pair. Il excelle sur les médias sociaux où il sait capter un public jeune. Il est aussi un habitué des émissions de divertissement”, observe Carl Devos.

Tout récemment, dans l’émission “The masked singer”, il a même laissé entrevoir des talents de chanteur. Les étudiants flamands, eux, écoutent les bons conseils de “mateke” Rousseau sur YouTube: pour réussir ses examens, il faut bouger, dormir suffisamment, potasser la table des matières et pas d’alcool.

Mais Rousseau s’adresse aussi aux Flamands ordinaires en se présentant comme quelqu’un qui n’est pas inféodé au système. “Il parle peu de ses adversaires ou des autres partis. Il parle surtout de lui et veille à se distancier des mauvaises pratiques en politique“, note Carl Devos.

Sur le fond, Conner Rousseau livre une vision claire de la vie en société, où les droits sont indissociables des devoirs. Sur la migration ou la mise à l’emploi, son discours penche clairement à droite. Il n’hésite pas à aller chasser sur les terres du Vlaams Belang, comme lors de sa sortie fracassante sur Molenbeek où “on ne se sent plus en Belgique”, exprimant par-là “un sentiment que beaucoup de Flamands partagent”.

Ces dernières déclarations ont eu le don d’énerver côté PS, mais ce sera peut-être vite oublié. Carl Devos: “Les deux partis ne vont pas se laisser tomber l’un l’autre. S’ils sortent du scrutin en tant que première famille politique, ils revendiqueront le 16 rue de la Loi. Ils ne laisseront pas le poste à De Croo.“

Dernier élément et non des moindres, Conner Rousseau jouit de l’estime de Bart De Wever. Carl Devos: “Cette ‘bromance’ se traduit déjà par un rapprochement entre nationalistes et socialistes à Anvers et à Gand. La formule pourrait s’imposer au niveau du futur gouvernement flamand. Rousseau pourrait ainsi se retrouver dans une position de bâtisseur de ponts entre les partis flamands et le PS en 2024.  Il jouera de toute façon un rôle important à l’issue des élections.“